ASCENSION DU CHO OYU - RETOUR D'EXPERIENCE
AVANT PROPOS
Mon entrainement était indispensable, mais si je refais un jour
une expédition je m'y prendrai autrement si j'en ai le temps matériel.
L'expérience sur le terrain et la comparaison avec les gens rencontrés,
plus ma visite à la médecine du sport et la conversation
qui en résulta avec un médecin, ont fait que je voudrai expérimenter
d'autres orientations d'entrainement. Point capital aussi, la diététique,
dont l'hydratation, sujet très délicat en altitude. J'aborde
ces différents points ci-dessous.
CONSTATATIONS
A basse altitude, j'étais l'un des moins performant en terme de
durée de marche et de puissance physique, pourtant cela ne m'a pas
empéché d'arriver au sommet. La condition physique est importante
pour la réussite, mais viennent s'y ajouter la résistance
à l'altitude, aux maladies, la stratégie d'ascension,
la volonté, le matériel, et le facteur météo,
tout cela dans une plus grande mesure que le naturel laisserai penser.
Les gens ont tendance à juger uniquement sur le facteur physique,
et à négliger les autres facteurs, en pensant que le
reste est surtout de la chance. C'est vrai sur la météo,
et peut-être sur la résistance à l'altitude que
l'on peut qualifier de génétique et que l'on ne contrà´le
pas. Mais tout le reste doit aussi être géré.
Certains m'ont dit "tu as eu beaucoup de chance", c'est pour cela que
tu es allé au sommet et pas nous. Je ne suis pas d'accord avec eux
car il ont eu exactement les mêmes chances que moi. Parce qu'ils
se considéraient plus fort physiquement, ils se voyaient plus au
sommet. Et comme j'avais réussi et pas eux, cela ne pouvait être
que de la chance. Seulement ils oubliaient les autres facteurs qui avec
l'altitude prennent de plus en plus d'importance. " Si je n'avais pas été
malade de la gorge, je continuais au sommet sans problème ! me dit
l'un ! - si j'étais aussi bien acclimaté que toi, sans mal
de tête, j'aurai pu continuer, me dit un autre !". Pourquoi ont-ils
fait demi-tour lorsqu'il étaient en route vers le sommet au même
moment que moi ? J'aurai bien voulu ne pas arriver seul au sommet, et que
des gens continuent en équipe avec moi. Ils étaient malade,
gorge, altitude, qu'importe cela fait partie du challenge. A part une bonne
météo ( c'est déjà très bien ),
je n'ai pas eu de chance plus particulière le jour du sommet,, en
tous cas pas plus que tout autre qui m'accompagnait. Je suis moins fort
physiquement mais plus résistant à la maladie et à
l'altitude, facteurs qui deviennent prépondérants au dessus
de 7500m, quand le physique à déjà permi
d'y parvenir. Quelqu'un qui n'a pas le minimum de physique et de volonté
nécessaires ne dépasse pas généralement les
6500m.
Hors sherpas et organisateurs, les plus forts étaient un guide
de montagne américain, un caméraman professionnel de l'outdoor,
un éleveur de bétail baroudeur canadien, un gérant
de magasin dans le colorado, un ingénieur en electronique auteur
de plusieurs premières et grandes voies dans l'hymalaya. Le seul
à avoir réussi le sommet est le cameraman.
Dans ces personnes, ceux qui ont raté ont fait beaucoup plus
d'aller retour que moi vers les différents camp car ils avaient
choisi une formule moins chère o๠ils étaient
indépendants dans les camps supérieur, et ils devaient donc
porter leur propres tentes. Pour faire un 8000, il faut viser le moins
d'efforts possible, à moins de se savoir des capacités
de résistance hors du commun. En prenant la formule complète
ou les sherpas installaient les camps supérieurs, j'économisais
mes forces. C'est peut-être une réussite moins grandiose que
d'avoir été plus autonome, mais c'est mieux que pas de réussite
du tout ! Et les moi ceci, moi cela que j'ai entendus au début du
séjour, je ne les ai plus du tout entendus après ma réussite.
REFLEXION SUR LE POINT DE VUE ENERGETIQUE
Au camp de base, on arrive avec une réserve d'énergie qu'il
est difficile de reconstituer en séjournant à un camp
de base élevé ( 5700m ) comme celui du Cho Oyu. Les efforts
fournis entament durement cette réserve d'énergie, allant
jusqu'à largement puiser dans la masse musculaire si les phases
de repos et la compensation alimentaire sont insuffisants. Quelque soit
l'altitude, pour faire 100m de dénivelée montante, il faut
le même nombre de kilowatts. Pour monter avec un sac lourd, le niveau
de puissance nécessaire est important. Seulement pour produire ces
kilowatts, le corps humain a besoin de carburant de qualité, l'apport
en oxygène étant capital pour la combution de ce carburant.
L'acclimatation en augmentant le nombre de globule rouge permet d'accroitre
la disponibilité d'oxygène, et donc la production de l'énergie
suffisante pour aller plus en altitude. Seulement, la baisse des réserves
énergétique est au fil des jours inéluctable et progressive,
de manière plus ou moins prononcée selon les capacités
des personnes. Acclimaté ou pas, lorsque les réserves adaptées
à la performance sont épuisées, l'effort de
montée devient trop important, on se sent faible et impotant. C'est
là que la statégie d'ascension prend son importance,
car il faut essayer de progresser vers le sommet en ayant à
l'esprit d'optimiser au maximum sa dépenser d'énergie, à
moins de savoir par avavance et par expérience que vos capacités
sont largement supérieures aux besoins. Inversement, il ne faut
pas non plus trop se ménager, car un 8000 ne peut s'obtenir qu'à
l'arrachée, en allant au bout de ses forces. Mais lorsqu'on le fait,
il faut que ce soit utile, sinon la dépense énergétique
n'est pas optimum.
Sans le savoir à l'avance, j'avais un potentiel potentiel
énergétique vraiment juste pour effectuer le sommet. J'avais
décidé au départ de faire 3 assauts vers les camps
supérieurs, mais je me suite vite rendu compte lors du 2ème,
que je n'aurais plus la force de revenir une 3ème fois. J'ai concentré
mes dernières forces sur le sommet, et j'ai réussi. Je savais
aussi qu'il faut réussir le plus vite possible. La courbe d'état
de forme dans le temps est en forme de cloche. Au début la forme
augmente car l'acclimatation se développe; ensuite il y a un palier,
le meilleur moment pour faire le sommet, puis la forme décroit car
la fatigue s'installe. Au dessus de 5200m, aucune récupération
complète n'est possible . Ceux qui ont tenté le sommet sur
un 3ème ou 4ème assaut ont tous échoués. Pas
forcément pour des raisons physiques, plutot des raisons météo,
mais ayant raté leur 2ème assaut, il ont du récupérer
au camp de base pendant toute la période de beau temps.
Mes forces ont diminué tout au long du séjour au camp
de base, et par rapport à un potentiel de 100% au début,
je l'estime à 20% à la fin. Je n'était
pratiquement plus capable de marcher en montée, et bien incapable
de retourner au camp 1 auquel je suis monté 3 fois. D'autres ont
fait 5 voyages et semblaient à 70% de leur forme initiale
à la fin du séjour. Par exemple à la fin
du séjour, là ou j'ai mis 10 heures pour redescendre
les 30 kilomètres du camp de base à la route, le canadien
à mis 4 heures 30. Je n'arrive pas encore à voir
comment c'est possible ! Et si je compare avec daniel mazur, il a fait
dans la même journée départ C3 - sommet - C3 - C2 -
C1 - retour camp de base en 20 heures d'affilée. J'ai fait la même
chose au maximum de mes possibilités en 3 jours avec un cumul de
12 + 4 + 7 = 23 heures en m'étant reposé à chaque
camp. Par contre à 30 minutes près, j'ai mis le même
temps que lui pour aller du C3 au sommet. J'en déduis que mes qualités
sont vraiment la resistance à l'altitude, mais cela me met
à genou du point de vue énergétique et hydrique.
Je constate aussi que daniel à bu 8 litres d'eau le jour précedent
le sommet, contre peut-être 2 pour moi ! Au camp de base il mange
comme un ogre, au moins 2 à 3 fois plus que moi. C'est une
vraie poubelle de table ! Je me suis plutà´t sous-nourri à
cause de la nourriture toujours froide, et pas toujours adaptée
à mes gouts. Si il faut manger autant que cela, je comprends
pourquoi je manquais d'énergie sur la fin.
L'ENTRAINEMENT IDEAL?
La principale chose que j'ai à améliorer pour la montagne
en général, c'est ma capacité à tenir
un effort soutenu pendant de nombreuses heures, et celle de faire des efforts
soutenus chaque jour, plusieurs jours d'affilée, sans que le potentiel
à faire ces efforts soutenus ne diminue trop au fil des jours
( ouf ! ).
Un effort de 40 minutes de footing 3 fois par semaine est insuffisant.
D'après le medecin du sport, il faut augmenter le volume d'entraînement.
Soit faire de nombreux entraînements courts, soit faire des entraînements
beaucoup plus long, le mieux étant de combiner les 2. Il m'a aussi
expliqué que généralement, lorsque quelqu'un commence
à faire du footing, sa masse musculaire est suffisante, même
pour un sédentaire. C'est la capacité pulmonaire qui est
le facteur limitant. Les progrès se font ensuite sentir par l'augmentation
des capacités respiratoires, mais modérément par la
prise de masse musculaire, car la course de fond ne contribue que très
peu à celle-ci.
Au contraire, partir d'un certain niveau atteint, c'est le manque de
potentiel musculaire qui limite les progrès. Il faut donc un complément
de musculation pour pouvoir aussi progresser en endurance. Faire de la
musculation ( cuisses, abdos, étirements, ... ) ne me serait pas
venu à l'idée pour améliorer mon endurance !
Je pense qu'un bon entraînement adapté à ce
que je recherche est du genre :
2 grosses sorties par semaine ( 2 à 4 heures selon l'activité
), à intensitée soutenue ( ce n'est pas de la balade
). Par exemple une à pied ( course, randonnée, .. ),
une à vélo ( route, vtt, ... ). 3 séances de
musculation hebdomaires, dont 2 o๠les jambes sont travaillées.
5 séances d'un petit exercice journalier comme 30 minutes de footing,
ou vélo d'appartement, ou piscine. Plus tous les jours, abdominaux
et étirements. Bref il faut un boulot à mi-temps !
Un terrain montagneux contribue largement à la qualité
de l'entrainement. Petit footing ou marche soutenue dans une longue montée,
passage d'un col en vélo, font que l'intensité minimum nécessaire
pour avancer est plus importante que sur du plat. Et de temps en temps,
de vraies grosses sortie montagne ( 6 à 12 heures ) pour mettre
tout cela en application. L'intensité de l'exercice est la clé
des progrès. Si on ne force pas assez aussi bien en temps qu'en
intensité, on produit de la fatigue, mais pas une élévation
régulière de performances. Lorsque l'on a déjà
un minimum d'entrainement, avoir une augmentation significative de ses
performances est difficile.
Mesure des progrès. Il ne faut pas procéder à
l'aveuglette. Il faut trouver des indicateurs pour mesurer si l'entrainement
est bénéfique ou non.
DIETETIQUE
Tout poids de graisse en trop sur le corps est un poids inutile à
porter. On considère que l'on est bien placé à
partir du moment ou la masse grasse est inférieure à
10% de la masse totale ( difficile à obtenir et à
garder !).
Nous avons toujours assez de graisse, et toute réserve au minimum
soit-elle, peut-être considérée pour nous européen,
comme infinie par rapport aux efforts que nous entrepenons.
Pour l'effort à la journée, le coté diététique
revêt moins d'importance ( même s'il en a ) que pour l'effort
en altitude sur plusieurs jours, où il devient capital. Si je repars
une autre fois, il faudra que je trouve quelque chose pour maintenir une
bonne hydratation et une bonne récupération énergétique,
une des clés de la réussite.
HYDRATATION
Sur un effort répété sur plusieurs jours, dans un
air très sec, quoi que l'on fasse il y a une déshydratation
de fond qui s'installe. L'assimilation de l'eau se fait trop lentement
par rapport à son élimination par les voies naturelles
urinaires, sudatives, et respiratoires, pour se refaire comme ça
! Il faudrait boire de très petites quantités de manière
quasi continue pour compenser les pertes, ce qui est impossible pendant
un effort important. Sur plusieurs jours, la sensation de soif n'a plus
grand chose à voir avec l'état de déshydratation.
Puisque pendant l'effort on ne boit qu'uniquement pour combattre la sensation
de soif, la réhydratation de fond doit se faire pendant les périodes
de repos. En gros, plus on boit et plus la prise est étalée,
mieux c'est. Mais boire beaucoup de matière étalée,
la nuit c'est difficile. Boire beaucoup dit aussi éliminer beaucoup.
Passer sa nuit à faire fondre de la neige, à
boire, à éliminer, alors qu'à cause de
l'altitude il fait froid, que tout effort est pénible, et que l'on
est bon qu'à rester au fond de son duvet, est un vrai problème.
Apparament, dans les camps d'altitude il faut privilégier l'hydratation
sur la qualité du sommeil. Mais l'effort de se redresser, de faire
pipi dans une bouteille, d'ouvrir la tente pour la vider dehors, fait que
l'on a tendance à boiret insuffisament; Au fur et à
mesure des jours une déshydratation de fond s'installe.
Je pense qu'il faut se préparer psychologiquement au problème
avant de partir, en affutant son matériel, pour sur place pouvoir
se dire : je n'ai pas soif, mais il faut que je boive coute que coute !
C'est capital pour les jours suivants.
FAIRE LE PLEIN D'ENERGIE
Manger pour récupérer est à placer en second
par rapport à l'hydratation, mais c'est aussi très
important. Là aussi, c'est dans les camps d'altitude que l'on
accumule un déficit. Manger à hauteur des dépenses
de la journée ( 5000 calories )en altitude est difficile à
causedu manque d'appétit, du manque d'atytrait des aliments, ...
, et n'est pas souhaitable à cause des efforts de digestion.
La ration importante est celle du soir, pour récupérer les
sels minéraux perdus dans la journée, se refaire une santé.
Le matin il faut éviter de surcharger l'estomac avec un effort de
digestion qui viendra s'ajouter aux efforts de la matinée, si ces
efforts sont critiques. Par contre il faut tout de même manger, car
c'est de l'énergie pour plus tard dans la journée. Bien se
connaitre, faire des essais de performance sur de longs efforts pour trouver
la meilleure formule de petit déjeuner, est un atout supplémentaire,
chacun a ses particularités en terme de nourriture.
La nature des aliments est importante, car manger sans faim des choses
que l'on apprécie peu : ... impossible !
De plus, à 7000 l'eau boue à 83°c,
les pà¢tes sont à proscrire, elles restent dures.
Le lyofilisé : léger mais mauvais !
N'oubliez pas que vous ne débarquez pas de l'hotel, et qu'au
fil des jours au camp de base, vous supportez de moins en moins la nourriture
que vous n'appréciez pas. Contrairement à ce que l'on
pourrait penser, on ne s'habitue pas, on déteste de plus en plus
! Une barquette testée en france préalablement, avec de la
vraie viande, quel régal par rapport à du riz réhydraté.
Il faut composé avec l'altitude du camp visé et le poid du
sac. Mais il faut savoir que sur une expédition d'une longue durée,
confort et plaisir ont une grande importance.
Si je dois repartir, je payerai un exédent de bagage, mais j'aurai
mes 10 kilos de bouffe française pour l'altitude, et un siège
genre siège bas de plage pour pouvoir m'assoir dans les petites
tentes du camp de base et du camp 1.
Les efforts de plus de 10 h sur une journée. Pendant une randonnée
au de 3 heures, on baisse de régime si l'on ne boit pas, mais ce
n'est pas pour une question de déshydratation de fond, mais simplement
parce que le corps est en surchauffe et qu'il faut baisser sa température.
Même si la compensation n'est pas suffisante par rapport à
la sudation, et que 10% de puissance est perdue, la performance est moins
bonne, mais avec des pauses on y arrive toujours. Par contre, au delà
de 10 heures d'effort, on peut largement sentir un épuisement total
du au manque d'énergie et à la déshydratation
de fond qui s'installe. Le manque de sucre pour le cerveau qui ne marche
qu'à cela agrave la situation, car il y ajoute de la déprime.
Là intervient la volonté.
Pour un effort sur une grosse journée, il faut donc arrivé
hydraté au maximum, les muscles reposés et pleins d'energie,
ne pas avoir fait d'effort les 2 jours précédents, et combattre
la déshydratation au maximum. Après, le débat est
ouvert, sur faut-il manger pendant l'effort ou non ! ( Bénéfice
de l'apport par rapport au bénéfice de l'effort de digestion
et de la transition brutale du taux de sucre dans le sang ).
Lorsque l'on accumule les jours de ce type, si on arrive pas à
compenser, on arrive comme moi après 31 jours à 5700m
et plus : on arrive à peine à marcher 200m de
suite, on sent nettement l'énergie qui ne se distille pas assez
vite, par des filières de transformation couteuses des réserves
( on tape directement dans le muscle ), on finit avec des jambes maigres
comme des cannes.
Pourtant des expériences ont montré que lorsque l'on
dispose de tout ce qu'il faut en nourriture et en eau, et que l'on gère
bien ses efforts, dans un contexte supportable, on ne maigri pas.
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